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lundi 7 février 2011

Agriculture et sécurité alimentaire

Si le mil, le sorgho et l'igname restent les valeurs sûres de l'alimentation togolaise, l'agriculture s'est beaucoup diversifiée. Le maïs est aujourd'hui la première culture, devant le riz et le coton. Elle est devenue également beaucoup plus planifiée, et, sans être encore vertueuse, nullement indifférente aux valeurs de l'agriculture durable. Il faudra attendre probablement encore une génération pour que les villageois saisissent à quel point le déboisement est contre-productif et néfaste pour leur qualité de vie immédiate, l'économie de leur région et la prospérité de leur agriculture. En quinze ans, beaucoup de choses néanmoins ont émergé, des cultures nouvelles ont pris racine.
La proximité de l'hôtel où je suis descendu à Atakpamé et de la Direction régionale de l'agriculture de la région des Plateaux, m'a incité à en savoir plus. En savoir plus sur les priorités affirmées de la politique agricole togolaise et sur la perception qu'on a, ici, des dossiers qui préoccupent la planète agro-alimentaire. Le directeur m'a reçu avec une grande courtoisie dans son bureau sans autre protocole. Sans même prendre rendez-vous.
  1. Le reboisement. Question : A Lavié, quelques kilomètres après Kpalimé, toutes les familles se sont mises à faire de la pépinière. Une activité initialement lucrative lorsqu'elle ne concernait que quelques familles, qui l'est beaucoup moins aujourd'hui, et, qui par ailleurs, pose des problèmes d'alimentation en eau des villageois ?  La conséquence d'un déficit de planification ?
< Le reboisement est géré par le ministère de l'Environnement. Mais on fait souvent ce qu'on voit faire. On a commencé avec une ou deux personnes, et puis les autres voyant le niveau de vie des bénéficiaires s'améliorer se sont lancés. Quant au problème de l'eau ?.. La concentration n'est pas souhaitée. Mais c'est ainsi. Aujourd'hui, on trouve des pépinièristes partout, sur tout le territoire togolais. Le marché intérieur du teck est très demandé. On en a beaucoup exporté ces dernières années, des tecks plantés il y a trente ans et même pendant l'époque coloniale. Des arbres provenant davantage des teckeraies de l'Etat que du privé. D'où la naissance en masse aujourd'hui de teckeraies privées.>
Des étendues de pépinières de tecks, élevées aux portes de Lomé. Des forêts de jeunes tecks accompagnent ainsi le voyageur sur plus d'une centaine de kilomètres entre Sotouboua et Kara, dans le nord du Togo.

Après des decennies de déforestation, pour un usage souvent simplement domestique du bois (comme combustible, en le transformant en charbon de bois), sans que l'on se préoccupe même de pérenniser la matière première, le Togo replante aujourd'hui. Pour chaque arbre abattu, trois arbres doivent être plantés. Sur le terrain, il apparait difficile de faire respecter cette mesure par les nombreuses familles vivant de la transformation du bois en charbon de bois.

    2. Le soutien de l'Etat à l'agriculture. Question : Sans aides publiques, l'agriculture européenne, notamment française, aurait des difficultés à vivre. Un état de fait dénoncé par les pays émergents et africains, contraints de s'en accomoder. Quelles formes prend l'aide à l'agriculture de l'Etat togolais ?

< La politique d'accompagnement des agriculteurs prend notamment la forme, depuis trois ans, du crédit "intrants". L'agriculteur paie après la récolte. Elle se décline aussi sous la forme d'un appui à l'accès au matériel agricole, notamment les tracteurs. Les tracteurs de l'Etat sont mis à la disposition de l'agriculteur, avec tractoriste, à coût très concurrentiel, à 20.000 francs l'hectare (30 euros). Les opérateurs privés louent à 35.000 francs. Enfin, le ministère a mis en place un dispositif d'aide à l'équipement agricole sur la base de la qualité du travail réalisé. Le Forum de l'agriculture togolaise qui a lieu une fois par an dans une région différente, mi-février, est l'occasion pour les agriculteurs et leurs représentants de discuter avec le président sur les problèmes, la qualité de l'équipement animal ou mécanique, les intrants, etc. Des aides personnalisées sont allouées à l'occasion de ce forum.>

La location de matériel appartenant à l'Etat est l'une des formes que prend le soutien au développement agricole, au Togo. Prêt de tracteur, remorque, semoir ou charrue, pour une ou plusieurs journées, et tarifé 20.000 francs CFA à l'hectare, technicien agricole compris. Le parc de matériel agricole appartenant à la Direction régionale agricole de la région des Plateaux compte vingt tracteurs, onze de la marque indienne Sonalika (70 chevaux) et neuf de la marque chinoise Farmtrac (60 chevaux). Les contractants exploitent 5 hectares en moyenne. Le parc des machines agricoles est placé sous la responsabilité de Yao Guezere, ingénieur rural  (notre photo).



Comme à Patatoukou, les plantes maraichères prennent possession des rives des rivières.
  3. Le maraîchage. Question : L'aide publique bénéficie-t-elle au maraîchage ?

< Le maraîchage est complètement intégré dans le développement agricole. Le Togo s'est doté d'un programme de sécurité alimentaire, notamment en terme de qualité. Ce programme a été adopté l'année dernière par le gouvernement et soumis à l'Assemblée. Il prend en compte la question de la qualité alimentaire de façon prosaïque. Si les jardins se sont développés, c'est qu'ils répondent à une demande intérieure de plus en plus importante. La production agricole locale a pour objectif premier de répondre au marché local. >

Les rives de la rivière Kara : une terre fertile propice à la culture maraichère. Lors de ses crues, la rivière inonde pendant deux mois une grande partie des jardins.
 
Raphaël cultive choux, salade et piment depuis sept ans. La majorité de sa récolte est expédiée vers la capitale, Lomé, au sud.
     4. L'importation des surplus céréaliers des pays producteurs excédentaires. Question : L'afflux massif de céréales provenant des excédents européens depuis la fin des années 80 est à l'origine de nouvelles habitudes alimentaires mais a aussi déséquilibré les marchés intérieurs africains, et entrainer un dumping sur les prix au détriment des paysans locaux. Comment le Togo a-t-il géré cette donne ?


Les rizières de la région de Sodo.
< Pour prendre l'exemple du riz, le Togo importe chaque année pour 4 milliards de francs CFA, majoritairement des pays asiatiques. L'objectif du Programme de sécurité alimentaire est de réduire la facture de l'importation, tout en accompagnant la culture intérieure. Pour le riz, des dispositions seront prises pour faire reculer ce déficit.
Le riz au Togo est cultivé dans les bas-fonds, dans les zones qui regorgent d'eau où les autres céréales autochtones ne poussent pas toujours. Donc le Togo pense à aménager sérieusement les bas-fonds pour développer le riz et le maraîchage. Pendant les mois de sécheresse, il y a encore de la fraîcheur dans ces bas-fonds. >


   5. Les Organismes génétiquement modifiés. Question : Quelle est la position du Togo sur les OGM ? L'agriculture traditionnelle ayant démontré son incapacité à réguler la question alimentaire, les OGM ne pourraient-ils constituer une opportunité ? La tentation doit être grande ?

< Le Togo n'a pas de position officielle et n'a pas de politique globale sur le sujet. La position du Togo est celle de la Cedao (Communauté des Etats d'Afrique de l'ouest) : "Attendons et voyons". >

Possède-t-il au moins les moyens de contrôle ? S'est-il doté des moyens pour anticiper une éventuelle stratégie de contournement qui le mettrait devant le fait accompli ?

< Le Togo ne dispose pas des moyens de contrôler et ne s'est pas donné les moyens de le faire. Il n'a pas exprimé de position très nette sur le sujet. >

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