Marguerite, 19 ans, a accouché d'une petite fille, le 19 janvier vers midi. |
Le géniteur est attendu pour décider des prénoms du nouveau-né : prénom de baptême, prénom traditionnel, prénom du jour de la semaine, soit dans la langue régionale datcha, probablement ayawavi pour cette petite fille née un jeudi. L'esprit de Marguerite est encore accaparé par l'immense bataille pour la vie remportée par son corps. D'une boule de pagne, émerge un petit crâne. Toute la pièce baigne dans un bonheur et une sérénité surréalistes.
Un bâtiment vétuste |
Un équipement rudimentaire, à l'entretien approximatif, rongé par la saleté. |
Dans cet hôpital aux moyens dérisoires sans même l'eau courante, dans ce décor de poussière brunâtre qui macule, du sol au plafond, les murs, les serviettes de toilette, la table d'accouchement, la lessiveuse où l'on fait bouillir l'eau, les registres de prise en charge, les pharmacies de fortune, Doria, Bérénice et Gisèle, la sage-femme et les deux infirmières, sont le lien avec la modernité, le relais des accoucheuses traditionnelles (dont Gisèle assure qu'elles se raréfient), le vecteur moteur vers un affranchissement progressif de la femme, de la tradition.
La salle commune de la maternité |
Bérénice, dans la salle de soins des nouveaux-nés. |
Gisèle : < 70 à 80 % des jeunes femmes enceintes de Savalou se rendent aux consultations prénatales des septième et huitième mois de grossesse.> |
Après sa terminale, Doria a suivi trois ans de formation à Cotonou. |
Après son BEPC, Bérénice a suivi les cours de l'Ecole nationale des infirmières brevetées pendant trois ans. |
L'impact de ce suivi temporaire de femmes se préparant à donner la vie mais évoluant dans un contexte quotidien éloigné des préoccupations sanitaires de base, serait un échec s'il ne dépassait le cadre du suivi de la maternité. Ces consultations sont aussi des espaces de sensibilisation à la planification familiale (l'avortement est illégal au Bénin), et aux risques de contagion du sida. < Toutes les femmes sont encouragées à espacer les naissances, à respecter au moins deux ans entre chaque grossesse, précise Doria. Les femmes comprennent qu'avec des naissances rapprochées, on multiplie les risques. A cause de la chèreté de la vie, du coût prohibitif des médicaments comparés aux faibles moyens dont elles disposent >, et considérant que les maris ne prennent leur part du fardeau qu'à la marge, < les femmes commencent à crier au quatrième enfant. La plupart en veulent trois au maximum.>
Un test de dépistage du VIH est proposé dès < le premier contact >, poursuit Doria. < Si la femme refuse, on laisse et on le propose au second rendez-vous, puis à nouveau au suivant s'il y a un nouveau refus. On essaie de convaincre sur l'intérêt à s'y soumettre. On ne nous a pas donné l'autorisation d'effectuer le dépistage systématique. A chaque visite, on insiste. Réaliser le test sans le consentement de la patiente serait immoral, et c'est interdit. Le taux de prévalence du Bénin s'est stabilisé autour de 1,8 à 2 % de la population, selon les chiffres officiels.>
De droit affichez-vous la nudité de la pauvre fille? A visage découvert en plus.
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