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vendredi 14 janvier 2011

Retour sur le 10 janvier

Au-delà de ses dimensions spirituelle et rituelle, la Fête du vaudou, le 10 janvier, est une fête identitaire et d'appartenance à une culture. Une fête familiale et villageoise, où l'on se rend aussi pour partager le repas sur la plage du 10 janvier. Elle rassemble des milliers de personnes.

 
Où la convivialité est avant tout de mise, même si quelques débordements dûs à l'alcool sont inévitables.
 Victime de son succès et des difficultés logistiques croissantes qu'il entrainait pour un hameau dont la voie principale se termine en cul de sac en débouchant sur la plage, la Fête, primitivement organisée à Grand-Popo, à la sortie de Gbecon, se décline aujourd'hui, dans toutes les régions du Bénin. La place du 10 janvier m'a paru rarement rassemblé autant de monde que cette année. "Une belle fête", selon les autochtones.


Où l'on déambule dans le plus bel appareil.


Tout a commencé par la parade et l'installation des autorités morales et spirituelles, lovées dans leur écrin de femmes vaudousis parées dans leurs meilleurs atours. Puis ce fut les discours, interminables... sous la présidence du Grand chef international du vaudou, Guedengue 2, successeur du Grand Guedengue 1er, décédé en 2009. En présence des chefs vaudous des différents villages, dans l'apparat des grands jours.

 
Le chef de Zogbedji, Tchabassi Amadossi.

Le chef de Kita 2.
Les vaudousi, des femmes initiées dans les couvents interdits à tout étranger.
Le groupe de percussionnistes dévoué au vaudou Agboevi Agban
Le chef du vaudou Agboevi Agban, roi des fétiches marins des Xwla (prononcer plat), c'est à dire des Popos, Ahouaugassi Hounjoulon Jézo, qui préside le vaudou des dix-sept villages de Grand-Popo.
 


Mais les discours... ? Un tumulte de sermons fanatiques, prosélytiques et paranoaïques. Et danger de tous les dangers pour les villageois dont la pensée se noie dans les atavismes vaudous, son assimilation à une science. Vont encore les exhortations à se souvenir de l'héritage _ une richesse culturelle en soi _, mais humainement inacceptables et condamnables, les encouragements à se détourner de la médecine occidentale (quand on ne dispose pas de mieux...). La prévalence de certaines maladies au Bénin, aujourd'hui éradiquées en Occident, suffit à le démontrer. Comme la surmortalité relative à certaines affections, que la médecine guérit aujourd'hui pleinement.


 Les charges entendues au micro de la tribune du 10 janvier devant une foule ignorante d'enfants, d'adolescents et de parents pas toujours alphabétisés, étaient tout bonnement irresponsables. Extraits du discours du "docteur" Erick Gbodossou (notre photo) : "Avez-vous vu une voudounsi avoir la variole? Non... Pourquoi ? Parce qu'on met des poudres pour se protéger contre la variole... Avez-vous vu un vaudou mourir du sida ?... Jamais... Etre parricide ? Etre Pédéraste ? Pédophile ?... Jamais... Des tests de dépistage du sida ont été réalisés dans les temples du vaudou. Savez-vous combien de vaudous étaient positifs ?... Zérooooo... Le vaudou est une science... une science qui dispose d'énormes solutions pour répondre aux défis sanitaires... Les séances publiques de divination organisées au Sénégal ont démontré une très grande efficacité. Les religions révélées ont montré leurs limites. Le monde a besoin aujourd'hui d'autre chose que de religion..., mais de spiritualité... Si vous ne savez pas où vous allez, revenez-là d'où vous venez." 
Un monstrueux embrouillamini braconné dans les tréfonds de la mémoire millénariste moyen-âgeuse européenne, par un médecin(?)-précheur, le dr Erick Gbodossou, président de Pro.me.tra (Promotion de la médecine traditionnelle). Une Organisation internationale ayant pour objectif de promouvoir les médecines traditionnelles, les religions anciennes et la spiritualité universelle.





La médecine vaudou, médecine du pauvre ? A Gbecon ou Grand-Popo, on se soigne prioritairement avec des remèdes maison dont la connaissance se transmet de génération en génération. Quand la maladie ou la plaie résiste, on fait appel au tradi-thérapeute et en ultime ressort à la médecine occidentale. Une médecine occidentale d'ailleurs fort peu respecteuse du serment d'Hyppocrate. On ne soigne dans les hôpitaux que si le patient a les moyens de payer et allonge les billets avant toute prise en charge. Il arrive donc souvent que les accidentés en situation d'urgence vitale meurent sur leur brancard, abandonnés dans un couloir, parce que les parents n'ont pas été assez prompts pour rassembler l'argent préalable au premier geste de secours.
A Gbecon, il n'y a pas d'infirmière. Le centre de soins de Grand Popo est une grande bâtisse vide sans moyens, ni matériels ni humains. Les personnes souffrantes de Gbecon font appel à un "infirmier" qui n'a pas même dépassé la classe de 6e, dont le vade-mecum pharmacologique se réduit à un seul remède : le sérum. Un sérum universel comme parade à tous les maux. Les familles subodorent son incompétence, mais la monnaie commande. Et on continue à faire appel à lui. Une personne qui fait ce qu'il peut... mais qui n'est pas infirmier, et qui est probablement responsable de nombreux décès. De dizaines de trépas inattendus. Chaque année, alors que je suis en France, j'apprend la mort soudaine de voisins, soit de maladie, soit accidentellement, qui ne présentaient pas de problèmes de santé particuliers. Et puis la maladie..., parfois la mort. Ainsi il y a deux ans d'un garçonnet de 5 ans, que les parents ont fait aller de féticheurs en guérisseurs pendant plusieurs mois...

Et puis la fête continue à Hévé. 17 heures : on repasse dans le sens inverse pour retrouver la place principale du village pour assister à la dernière valse du Zangbeto.





























1 commentaire:

  1. Super boulot Riquet ! Vraiment dépaysant ! Voici le lien vers ton blog sur lejdc.fr : http://www.lejdc.fr/dossiers/blogs_bourguignons@DRlBLDtUMisEHh0-.html

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